Читать бесплатно книгу «Dictionnaire raisonné de l'architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 4 - (C suite)» Eugene Emmanuel Viollet-le-Duc полностью онлайн — MyBook
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Déjà, dans les édifices du XIe siècle, on voit la construction faire des progrès sensibles qui ne sont que la conséquence de fautes évitées avec plus ou moins d'adresse; car l'erreur et ses effets instruisent plus les hommes que les oeuvres parfaites. Ne disposant plus des moyens actifs employés par les Romains dans leurs constructions; manquant de bras, d'argent, de transports, de relations, de routes, d'outils, d'engins; confinés dans des provinces séparées par le régime féodal, les constructeurs ne pouvaient compter que sur de bien faibles ressources, et cependant, à cette époque déjà (au XIe siècle), on leur demandait d'élever de vastes monastères, des palais, des églises, des remparts. Il fallait que leur industrie suppléât à tout ce que le génie romain avait su organiser, à tout ce que notre état de civilisation moderne nous fournit à profusion. Il fallait obtenir de grands résultats à peu de frais (car alors l'Occident était pauvre), satisfaire à des besoins nombreux et pressants sur un sol ravagé par la barbarie. Il fallait que le constructeur recherchât les matériaux, s'occupât des moyens de les transporter, combattît l'ignorance d'ouvriers maladroits, fît lui-même ses observations sur les qualités de la chaux, du sable, de la pierre, fît approvisionner les bois; il devait être non-seulement l'architecte, mais le carrier, le traceur, l'appareilleur, le conducteur, le charpentier, le chaufournier, le maçon, et ne pouvait s'aider que de son intelligence et de son raisonnement d'observateur. Il nous est facile, aujourd'hui qu'un notaire ou un négociant se fait bâtir une maison sans le secours d'un architecte, de considérer comme grossiers ces premiers essais; mais la somme de génie qu'il fallait alors à un constructeur pour élever une salle, une église, était certainement supérieure à ce que nous demandons à un architecte de notre temps, qui peut faire bâtir sans connaître les premiers éléments de son art, ainsi qu'il arrive trop souvent. Dans ces temps d'ignorance et de barbarie, les plus intelligents, ceux qui s'étaient élevés par leur propre génie au-dessus de l'ouvrier vulgaire, étaient seuls capables de diriger une construction; et la direction des bâtisses, forcément limitée entre un nombre restreint d'hommes supérieurs, devait, par cela même, produire des oeuvres originales, dans l'exécution desquelles le raisonnement entre pour une grande part, où le calcul est apparent, et dont la forme est revêtue de cette distinction qui est le caractère particulier des constructions raisonnées et se soumettant aux besoins et aux usages d'un peuple. Il faut bien reconnaître, dussions-nous être désignés nous-mêmes comme des barbares, que la beauté d'une construction ne réside pas dans les perfectionnements apportés par une civilisation et une industrie très-développées, mais dans le judicieux emploi des matériaux et des moyens mis à la disposition du constructeur. Avec nos matériaux si nombreux, les métaux que nous livrent nos usines, avec les ouvriers habiles et innombrables de nos cités, il nous arrive d'élever une construction vicieuse, absurde, ridicule, sans raison ni économie; tandis qu'avec du moellon et du bois, on peut faire une bonne, belle et sage construction. Jamais, que nous sachions, la variété ou la perfection de la matière employée n'a été la preuve du mérite de celui qui l'emploie; et d'excellents matériaux sont détestables, s'ils sont mis en oeuvre hors de la place ou de la fonction qui leur conviennent, par un homme dépourvu de savoir et de sens. Ce dont il faut s'enorgueillir, c'est du bon et juste emploi des matériaux, et non de la quantité ou de la qualité de ces matériaux. Ceci dit sous forme de parenthèses et pour engager nos lecteurs à ne pas dédaigner les constructeurs qui n'avaient à leur disposition que de la pierre mal extraite, du mauvais moellon tiré sur le sol, de la chaux mal cuite, des outils imparfaits et de faibles engins: car, avec des éléments aussi grossiers, ces constructeurs peuvent nous enseigner d'excellents principes, applicables dans tous les temps. Et la preuve qu'ils le peuvent, c'est qu'ils ont formé une école qui, au point de vue de la science pratique ou théorique, du judicieux emploi des matériaux, est arrivée à un degré de perfection non surpassé dans les temps modernes. Permis à ceux qui enseignent l'architecture sans avoir pratiqué cet art de ne juger les productions architectoniques des civilisations antiques et modernes que sur une apparence, une forme superficielle qui les séduit; mais pour nous qui sommes appelés à construire, il nous faut chercher notre enseignement à travers les tentatives et les progrès de ces architectes ingénieux qui, sortant du néant, avaient tout à faire pour résoudre les problèmes posés par la société de leur temps. Considérer les constructeurs du moyen âge comme des barbares, parce qu'ils durent renoncer à construire en employant les méthodes des Romains, c'est ne pas vouloir tenir compte de l'état de la société nouvelle, c'est méconnaître les modifications profondes introduites dans les moeurs par le christianisme, appuyé sur le génie des peuples occidentaux; c'est effacer plusieurs siècles d'un travail lent, mais persistant, qui se produisait au sein de la société: travail qui a développé les éléments les plus actifs et les plus vivaces de la civilisation moderne. Personne n'admire plus que nous l'antiquité, personne plus que nous n'est disposé à reconnaître la supériorité des belles époques de l'art des Grecs et des Romains sur les arts modernes; mais nous sommes nés au XIXe siècle, et nous ne pouvons faire qu'entre l'antiquité et nous il n'y ait un travail considérable: des idées, des besoins, des moyens étrangers à ceux de l'antiquité. Il nous faut bien tenir compte des nouveaux éléments, des tendances d'une société nouvelle. Regrettons l'organisation sociale de l'antiquité, étudions-la avec scrupule, recourons à elle; mais n'oublions pas que nous ne vivons ni sous Périclès ni sous Auguste; que nous n'avons pas d'esclaves; que les trois quarts de l'Europe ne sont plus plongés dans l'ignorance et la barbarie au grand avantage du premier quart; que la société ne se divise plus en deux portions inégales, la plus forte absolument soumise à l'autre; que les besoins se sont étendus à l'infini; que les rouages se sont compliqués; que l'industrie analyse sans cesse tous les moyens mis à la disposition de l'homme, les transforme; que les traditions et les formules sont remplacées par le raisonnement, et qu'enfin l'art, pour subsister, doit connaître le milieu dans lequel il se développe. Or la construction des édifices, au moyen âge, est entrée dans cette voie toute nouvelle. Nous en gémirons, si l'on veut; mais le fait n'en existera pas moins, et nous ne pouvons faire qu'hier ne soit la veille d'aujourd'hui. Ce qu'il y a de mieux alors, il nous semble, c'est de rechercher dans le travail de la veille ce qu'il y a d'utile pour nous aujourd'hui, et de reconnaître si ce travail n'a pas préparé le labeur du jour. Cela est plus raisonnable que de le mépriser.

On a prétendu souvent que le moyen âge est une époque exceptionnelle, ne tenant ni à ce qui la précède ni à ce qui la suit, étrangère au génie de notre pays et à la civilisation moderne. Cela est peut-être soutenable au point de vue de la politique, quoiqu'un pareil fait soit fort étrange dans l'histoire du monde, où tout s'enchaîne; mais l'esprit de parti s'en mêlant, il n'est pas de paradoxe qui ne trouve des approbateurs. En architecture, et surtout en construction, l'esprit de parti ne saurait avoir de prise, et nous ne voyons pas comment les principes de la liberté civile, comment les lois modernes sous le régime desquelles nous avons le bonheur d'être nés se trouveraient attaqués, quand on aurait démontré que les constructeurs du XIIe siècle savaient bien bâtir, que ceux du XIIIe siècle étaient fort ingénieux et libres dans l'emploi des moyens, qu'ils cherchaient à remplir les programmes qu'on leur imposait par les procédés les plus simples et les moins dispendieux, qu'ils raisonnaient juste et connaissaient les lois de la statique et de l'équilibre des forces. Une coutume peut être odieuse et oppressive; les abbés et les seigneurs féodaux ont été, si l'on veut, des dissipateurs, ont exercé un despotisme insupportable, et les monastères ou les châteaux qu'ils habitaient peuvent être cependant construits avec sagesse, économie et une grande liberté dans l'emploi des moyens. Une construction n'est pas fanatique, oppressive, tyrannique; ces épithètes n'ont pas encore été appliquées à l'assemblage des pierres, du bois ou du fer. Une construction est bonne ou mauvaise, judicieuse ou dépourvue de raison. Si nous n'avons rien à prendre dans le code féodal, ce n'est pas à dire que nous n'ayons rien à prendre dans les constructions de ce temps. Un parlement condamne de malheureux juifs ou sorciers à être brûlés vifs; mais la salle dans laquelle siége ce parlement peut être une construction fort bonne et mieux bâtie que celle où nos magistrats appliquent des lois sages, avec un esprit éclairé. Un homme de lettres, un historien, dit, en parlant d'un château féodal: «Ce repaire du brigandage, cette demeure des petits despotes tyrannisant leurs vassaux, en guerre avec leurs voisins...» Aussitôt chacun de crier haro sur le châtelain et sur le château. En quoi les édifices sont-ils les complices de ceux qui les ont fait bâtir, surtout si ces édifices ont été élevés par ceux-là même qui étaient victimes des abus de pouvoir de leurs habitants? Les Grecs n'ont-ils pas montré, en maintes circonstances, le fanatisme le plus odieux? Cela nous empêche-t-il d'admirer le Parthénon ou le temple de Thésée?

Il est bien temps, nous le croyons, de ne plus nous laisser éblouir, nous architectes, par les discours de ceux qui, étrangers à la pratique de notre art, jugent des oeuvres qu'ils ne peuvent comprendre, dont ils ne connaissent ni la structure, ni le sens vrai et utile, et qui, mus par leurs passions ou leurs goûts personnels, par des études exclusives et un esprit de parti étroit, jettent l'anathème sur des artistes dont les efforts, la science et l'expérience pratique, nous sont, aujourd'hui encore, d'un grand secours. Peu nous importe que les seigneurs féodaux fussent des tyrans, que le clergé du moyen âge ait été corrompu, ambitieux et fanatique, si les hommes qui ont bâti leurs demeures étaient ingénieux, s'ils ont aimé leur art et l'ont pratiqué avec savoir et soin. Peu nous importe qu'un cachot ait renfermé des vivants pendant des années, si les pierres de ce cachot sont assez habilement appareillées pour offrir un obstacle infranchissable; peu nous importe qu'une grille ait fermé une chambre de torture, si la grille est bien combinée et le fer bien forgé. La confusion entre les institutions et les produits des arts ne doit point exister pour nous, qui cherchons notre bien partout où nous pensons le trouver. Ne soyons pas dupes à nos dépens de doctrines exclusives; blâmons les moeurs des temps passés, si elles nous semblent mauvaises; mais n'en proscrivons pas les arts avant de savoir si nous n'avons aucun avantage à tirer de leur étude. Laissons aux amateurs éclairés le soin de discuter sur la prééminence de l'architecture grecque sur l'architecture romaine, de celle-ci sur l'architecture du moyen âge; laissons-les traiter ces questions insolubles; écoutons-les, si nous n'avons rien de mieux à faire, discourir sur notre art sans savoir comment se trace un panneau, se taille et se pose une pierre: il n'est point permis de professer la médecine et même la pharmacie sans être médecin ou apothicaire; mais l'architecture! c'est une autre affaire.

Pour nous rendre compte des premiers efforts des constructeurs du moyen âge, il faut d'abord connaître les éléments dont ils disposaient, et les moyens pratiques en usage alors. Les Romains, maîtres du monde, ayant su établir un gouvernement régulier, uniforme, au milieu de tant de peuples alliés ou conquis, avaient entre les mains des ressources qui manquaient absolument aux provinces des Gaules divisées en petits États, en fractions innombrables, par suite de l'établissement du régime féodal. Les Romains, lorsqu'ils voulaient couvrir une contrée de monuments d'utilité publique, pouvaient jeter sur ce point, à un moment donné, non-seulement une armée de soldats habitués aux travaux, mais requérir les habitants (car le système des réquisitions était pratiqué sur une vaste échelle par les Romains), et obtenir, par le concours de cette multitude de bras, des résultats prodigieux. Ils avaient adopté, pour construire promptement et bien, des méthodes qui s'accordaient parfaitement avec cet état social. Ces méthodes, les constructeurs du moyen âge, eussent-ils voulu les employer, où auraient-ils trouvé ces armées de travailleurs? Comment faire arriver, dans une contrée dénuée de pierre par exemple, les matériaux nécessaires à la construction, alors que les anciennes voies romaines étaient défoncées, que l'argent manquait pour acheter ces matériaux, pour obtenir des bêtes de somme, alors que ces provinces étaient presque toujours en guerre les unes avec les autres, que chaque abbaye, chaque seigneur se regardait comme un souverain absolu d'autant plus jaloux de son pouvoir que les contrées sur lesquelles il s'étendait étaient exiguës? Comment organiser des réquisitions régulières d'hommes, là où plusieurs pouvoirs se disputaient la prédominance, où les bras étaient à peine en nombre suffisant pour cultiver le sol, où la guerre était l'état normal? Comment faire ces énormes amas d'approvisionnements nécessaires à la construction romaine la moins étendue? Comment nourrir ces ouvriers sur un même point? Les ordres religieux, les premiers, purent seuls entreprendre des constructions importantes: 1º parce qu'ils réunissaient sur un seul point un nombre de travailleurs assez considérable unis par une même pensée, soumis à une discipline, exonérés du service militaire, possesseurs de territoires sur lesquels ils vivaient; 2º parce qu'ils amassèrent des biens qui s'accrurent promptement sous une administration régulière, qu'ils nouèrent des relations suivies avec les établissements voisins, qu'ils défrichèrent, assainirent les terres incultes, tracèrent des routes, se firent donner ou acquirent les plus riches carrières, les meilleurs bois, élevèrent des usines, offrirent aux paysans des garanties relativement sûres, et peuplèrent ainsi rapidement leurs terres au détriment de celles des seigneurs laïques; 3º parce qu'ils purent, grâce à leurs priviléges et à la stabilité comparative de leurs institutions, former, dans le sein de leurs monastères, des écoles d'artisans, soumis à un apprentissage régulier, vêtus, nourris, entretenus, travaillant sous une même direction, conservant les traditions, enregistrant les perfectionnements; 4º parce qu'eux seuls alors étendirent au loin leur influence en fondant des établissements relevant de l'abbaye mère, qu'ils durent ainsi profiter de tous les efforts partiels qui se faisaient dans des contrées fort différentes par le climat, les moeurs et les habitudes. C'est à l'activité des ordres religieux que l'art de la construction dut de sortir, au XIe siècle, de la barbarie. L'ordre de Cluny, comme le plus considérable (voy. ARCHITECTURE MONASTIQUE), le plus puissant et le plus éclairé, fut le premier qui eut une école de constructeurs dont les principes nouveaux devaient produire, au XIIe siècle, des monuments affranchis des dernières traditions romaines. Quels sont ces principes? comment se développèrent-ils? C'est ce que nous devons examiner.

PRINCIPES.--Pour que des principes nouveaux se développent, en toute chose, il faut qu'un état et des besoins nouveaux se manifestent. Quand l'ordre de saint Benoît se réforma, au XIe siècle, les tendances des réformateurs ne visaient à rien moins qu'à changer toute une société qui, à peine née, tombait déjà en décomposition. Ces réformateurs, en gens habiles, commencèrent donc par abandonner les traditions vermoulues de la société antique: ils partirent de rien, ne voulurent plus des habitations à la fois somptueuses et barbares qui jusqu'alors avaient servi de refuge aux moines corrompus des siècles précédents. Ils se bâtirent eux-mêmes des cabanes de bois, vécurent au milieu des champs, prenant la vie comme le pourraient faire des hommes abandonnés à leur seule industrie dans un désert. Ces premiers pas eurent une influence persistante, lorsque même la richesse croissante des monastères, leur importance au milieu de la société les porta bientôt à changer leurs cahutes contre des demeures durables et bâties avec luxe. Satisfaire rigoureusement au besoin est toujours la première loi observée, non-seulement dans l'ensemble des bâtiments, mais dans les détails de la construction; ne jamais sacrifier la solidité à une vaine apparence de richesse est la seconde. Cependant la pierre et le bois sont toujours de la pierre et du bois, et si l'on peut employer ces matières dans une construction en plus ou moins grande quantité, leur fonction est la même chez tous les peuples et dans tous les temps. Quelque riches et puissants que fussent les moines, ils ne pouvaient espérer construire comme l'avaient fait les Romains. Ils s'efforcèrent donc d'élever des constructions solides et durables (car ils comptaient bien bâtir pour l'avenir) avec économie. Employer la méthode romaine la plus ordinaire, c'est-à-dire en composant leurs constructions de massifs de blocages enfermés entre des parements de brique ou de moellon, c'était mettre à l'oeuvre plus de bras qu'ils n'en avaient à leur disposition. Construire au moyen de blocs énormes de pierre de taille, soigneusement taillés et posés, cela exigeait des transports impossibles, faute de routes solides, un nombre considérable d'ouvriers habiles, de bêtes de somme, des engins dispendieux ou d'un établissement difficile. Ils prirent donc un moyen terme. Ils élevèrent les points d'appui principaux en employant pour les parements de la pierre de taille, comme un revêtement, et garnirent les intérieurs de blocages. Pour les murs en remplissage, ils adoptèrent un petit appareil de moellon smillé pour les parements ou de carreaux de pierre, enfermant de même un blocage de cailloux et de mortier.



Notre fig. 2 donne une idée de ce genre de construction. Afin de relier les diverses parties des bâtisses, de chaîner les murs dans leur longueur, ils noyèrent dans les massifs, à différentes hauteurs, sous les appuis des fenêtres, au-dessous des corniches, des pièces de bois longitudinales, ainsi que nous l'avons figuré en A (voy. CHAÎNAGE). Dans ces constructions, la pierre est économisée autant que faire se peut; aucun morceau ne présente d'évidements: tous sont posés en besace; ce n'est qu'un revêtement exécuté d'ailleurs avec le plus grand soin; non-seulement les parements sont layés, mais aussi les lits et les joints, et ces pierres sont posées à cru sans mortier, comme l'appareil romain.

Ce genre de bâtisse est apparent dans les grandes constructions monastiques de Cluny, de Vézelay, de la Charité-sur-Loire (XIe et XIIe siècles). Les matériaux employés par les moines sont ceux qu'ils pouvaient se procurer dans le voisinage, dans des carrières dont ils étaient propriétaires. Et il faut reconnaître qu'ils les employèrent en raison de leurs qualités et de leurs défauts. Si ces matériaux présentaient des vices, si la pierre était gélive, ne pouvant s'en procurer d'autres, qu'au moyen de frais considérables, ils avaient le soin de la placer dans les conditions les moins désavantageuses, et, afin de préserver ces matériaux des atteintes de l'humidité et des effets de la gelée; ils cherchaient à les soustraire aux agents atmosphériques en les couvrant par des combles saillants, en les éloignant du sol, à l'extérieur, par des assises de pierres qu'ils allaient acheter dans des carrières plus éloignées.

Il y a toujours, dans les oeuvres des hommes qui ne comptent que sur leurs propres ressources et leurs propres forces pour agir, une certaine somme d'intelligence et d'énergie d'une grande valeur aux yeux de ceux qui savent voir, ces oeuvres fussent-elles imparfaites et grossières d'ailleurs, qu'on ne retrouve pas dans les oeuvres produites par des hommes très-civilisés, mais auxquels l'industrie fournit de nombreux éléments, et qui n'ont aucun effort à faire pour satisfaire à tous leurs besoins. Ces chercheurs primitifs deviennent souvent alors des maîtres et leurs efforts un enseignement précieux, car il faut évidemment plus d'intelligence pour faire quelque chose lorsque toutes les ressources manquent que lorsqu'elles sont à la portée des esprits les plus médiocres.




































































































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